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Approche systémique stratégique et hypnose

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  • Claude de Scorraille est psychologue, psychothérapeute, superviseure, formatrice, et conférencière, elle applique la thérapie brève systémique et stratégique de l'École de Palo Alto et du CTS du Prof. Nardone depuis plus de 15 ans. Elle est formée également à l'hypnose conversationnelle. Elle a une consultation à Paris et par digital. Elle enseigne la clinique de la relation au sein de l’École internationale Lact/Université de Paris 8 et à l’IAE de Paris dans le cadre du Master Administration des Entreprises. Elle est également intervenante et superviseure au CSAPA de Montreuil, centre de consultations spécialisé dans les addictions. Elle est présidente et co-fondatrice de LACT où elle développe des interventions individuelles et collectives avec la méthodologie de problem solving pour les particuliers et les organisations. Elle dirige chez LACT le centre de consultations spécialisées dans les troubles obsessionnels et compulsifs (TOC) en partenariat  avec l'OCD clinic ®

    Co-auteure "Stratégies de changement, 16 prescriptions thérapeutiques",  "Quand le travail fait mal", "Vers un humanisme pragmatique".

Dans cet article, Claude de Scorraille, psychologue systémicienne et présidente de LACT, explore comment l'approche systémique stratégique peut aider les patients en errance thérapeutique. Au lieu de se focaliser sur la compréhension des origines du problème, cette méthode innovante identifie et modifie les tentatives de solution qui maintiennent paradoxalement la difficulté. Une approche particulièrement pertinente pour ceux qui ont accumulé des explications sans parvenir à un changement concret dans leur quotidien.

une réponse pour les patients ayant multiplié des thérapies sans résultat

L'approche systémique stratégique, une réponse pour les patients ayant multiplié des thérapies sans résultat

Transformer les échecs thérapeutiques passés en leviers de changement

L'errance thérapeutique, ce parcours silencieux où les patients enchaînent les approches sans trouver de soulagement, représente une réalité bien plus fréquente que le monde de la santé mentale ne le reconnaît. 

Pour le thérapeute systémique stratégique, cette circonstance représente à la fois un défi et une opportunité unique. 

Comment transformer l'expérience d'échecs thérapeutiques passés en levier de changement ? 

C'est la question que je propose d'explorer dans cet article.

Le concept fondamental des tentatives de solution

Au cœur du modèle systémique stratégique se trouve le concept des tentatives de solution (souvent associé à l'École de Palo Alto. Il s'agit des actions de communication  (théorisées notamment par Paul Watzlawick tentées de manière répétitive par la personne, son entourage ou son système culturel pour résoudre une difficulté de vie avec soi, les autres ou le monde, sans y parvenir. Ce concept a fait l'objet d'une formalisation actualisée que l'on trouve dans le livre "Stratégies de changement" écrit par Vitry et al. en 2017 aux éditions Érès.

Ces tentatives de solution, loin de résoudre la difficulté initiale, créent un problème qu'elles perpétuent et aggravent en maintenant la personne dans une perception restreinte de la situation

Prenons l'exemple d'une personne souffrant d'insomnie qui s'efforce de plus en plus activement de s'endormir, vérifie constamment l'heure, calcule le temps de sommeil restant. Plus elle tente de contrôler son sommeil, plus celui-ci lui échappe.

Parmi l'ensemble des symptômes que présente une personne, le thérapeute systémique stratégique cherche spécifiquement ceux qui sont maintenus par des tentatives de solution redondantes, soit de la part du porteur du symptôme, soit de son entourage.

Un cas illustratif est celui d'un jeune homme qui consulte pour multiples symptômes anxieux. Le thérapeute identifie que son angoisse est principalement déclenchée et maintenue par sa tentative de solution consistant à éviter systématique des lieux publics. Paradoxalement, plus il évite ces lieux pour calmer son angoisse, plus il renforce son anxiété et maintient l'angoisse qui l'anime, tandis que ses autres symptômes anxieux, qu'il n'essaie pas activement d'éviter, fluctuent naturellement sans s'aggraver.

Comprendre la dynamique du patient "multi-thérapies"

Un patient qui a consulté plusieurs thérapeutes sans succès présente souvent une dynamique particulière. 

La consultation de multiples thérapeutes est devenue elle-même une tentative de solution, créant un système où le patient "consomme" de la relation thérapeutiquesans modifier ses perceptions.

"Je vais voir ce nouveau thérapeute pour enfin comprendre pourquoi j'ai ce problème", dit une patiente qui accumule les explications sans que rien ne change dans sa vie quotidienne.

Son discours sur son problème est devenu expert et rigide, avec un langage répétitif qui renforce le problème. C'est le cas d'un patient qui utilise un jargon psychologique précis pour décrire ses difficultés mais reste incapable de décrire concrètement ce qui se passe dans ses interactions quotidiennes.

Une circularité s'est installée entre la recherche de solutions et le maintien du problème, semblable à un hamster courant dans sa roue, avec l'illusion d'avancer tout en restant immobile.

Le patient, pour qui la compréhension est devenue un obstacle au changement, s'inquiète de sa situation : "Plus je comprends mon problème, plus je réalise à quel point il est complexe et profondément ancré. Je fais beaucoup d'efforts, je m'épuise, mais je n'avance pas”.

Questionner stratégiquement sans confronter

L'approche systémique stratégique considère que les tentatives de solution du patient sont parfaitement cohérentes dans sa logique personnelle et qu'elles ont probablement été efficaces à un certain moment de son parcours de vie. Le thérapeute ne cherche pas à lui faire comprendre que ce qu'il fait ne fonctionne pas.

C'est souvent le franchissement d'un seuil critique ou un changement dans le contexte de vie du patient qui a transformé ces solutions autrefois efficaces en mécanismes paradoxaux qui maintiennent désormais le problème. 

L'intervenant s'engage activement dans une communication suggestive et analogique qui, en mobilisant les canaux émotionnels, parvient à assouplir les perceptions limitées du patient et à libérer ses ressources internes grâce à une expérience émotionnelle qu’il cherche à provoquer.

Explorer les expériences thérapeutiques passées sans les invalider

Le thérapeute utilise des formulations qui suggèrent subtilement de nouvelles perspectives sans dévaloriser les thérapies précédentes.

Une exploration respectueuse crée un pont entre le passé thérapeutique et le présent, tout en ouvrant délicatement la porte à une réflexion critique sur le décalage potentiel entre compréhension intellectuelle et changement effectif.

L’intervenant peut demander :

  • " Je suis curieux de savoir ce que ces thérapies précédentes vous ont apporté de positif ?" 

ou 

  • " Parmi toutes ces approches, qu'est-ce qui vous a semblé le plus utile, même temporairement ?"

A une patiente qui a consulté cinq psychologues différents, il est judicieux de lui demander : 

  • "Qu'avez-vous appris sur vous-même à travers ces différentes rencontres thérapeutiques ?", 

Pour ensuite enchaîner avec cette question :

  • “ Et comment ces connaissances ont-elles transformé votre quotidien ?". 

Le thérapeute crée ainsi un contraste entre le savoir accumulé et l'absence de changement concret.

Approfondir la question cruciale : "Pourquoi maintenant ?"

Cette question simple mais fondamentale mérite une attention particulière, surtout avec les patients multi-thérapies : 

"Qu'est-ce qui fait que vous venez me consulter aujourd'hui et pas il y a trois mois ou dans trois mois ?"

Elle permet d'identifier trois éléments essentiels. 

Les contraintes externes : La consultation se fait-elle sous la pression d'un tiers ? 

À cette question, le patient répond parfois : "À vrai dire, c'est ma femme qui a insisté pour que je consulte maintenant." 

Cette réponse oriente immédiatement le thérapeute vers une dynamique systémique où le conjoint est partie prenante du problème.

Les événements déclencheurs spécifiques : Un incident récent a-t-il modifié l'équilibre précaire du contexte relationnel de la personne ? 

Une patiente qui consulte après des années de trouble anxieux peut répondre : "J'ai toujours géré mon anxiété tant bien que mal, mais depuis que ma fille a commencé à montrer les mêmes symptômes il y a deux semaines, je ne peux plus accepter cette situation." 

Cette information cruciale révèle un levier de changement que les thérapies précédentes n'avaient pas identifié.

L'évolution des tentatives de solution

Le patient réagit-il différemment à ses difficultés maintenant ou de la même façon qu’avant ?

Cette question révèle l'historique des actions entreprises par le patient face à son problème, qu'elles soient encore actives ou abandonnées. Elle met en lumière le cycle complet, depuis les efforts initiaux jusqu'aux éventuelles stratégies de renoncement ou de résignation.

  • Un thérapeute demande : "Qu'est-ce qui vous amène à consulter maintenant plutôt qu'il y a quelques mois ?" 
  • Le patient lui répond : "J'ai tout essayé - relaxation, méditation, sport - mais ça ne marche pas assez, j'ai quand même des attaques de panique et elles empirent. Maintenant j'ai renoncé, je reste chez moi et j'évite toute situation stressante. Ma vie n'a plus de sens." 
  • Alors le thérapeute reprend la réponse du patient et questionne à nouveau : "Vous avez donc d'abord tenté activement plusieurs approches, puis face à leur inefficacité, vous avez choisi une stratégie d'évitement. Comment cette nouvelle stratégie fonctionne-t-elle pour vous ?"
  • Ce qui amène le patient à constater un processus : "Au début, ça semblait aider, mais maintenant mon monde se rétrécit de plus en plus..." 

Cette séquence révèle à la fois les tentatives de solution passées (des tentatives de contrôle émotionnel) et actuelles (des actions répétitives d’évitement des situations stressantes), et toutes deux participent au maintien du problème selon des mécanismes différents mais complémentaires.

La réponse à cette question du "pourquoi maintenant ?" fournit souvent la clé de l'intervention stratégique, en révélant soit la pression systémique à l'origine de la consultation, soit un événement perturbateur qui rend le patient plus réceptif au changement, soit l'évolution des tentatives de solution qui ont atteint leurs limites.

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Explorer les effets systémiques des thérapies précédentes

S'appuyer sur la résistance plutôt que la combattre

Confronter le patient à l'inefficacité de ses tentatives de solution éveille sa résistance naturelle, car ces actions, bien que dysfonctionnelles dans leurs résultats, demeurent parfaitement logiques du point de vue de sa perception. 

Au lieu d'affronter cette cohérence interne, le thérapeute systémique stratégique utilise cette résistance comme un levier : 

  • "Votre réticence à essayer autre chose montre à quel point vous avez été cohérent jusqu'à présent..." 

ou 

  • "Cette façon de faire a probablement eu sa raison d'être, même si aujourd'hui elle semble moins efficace..."

Face à un patient résistant à l'idée d'arrêter de cogiter sur son problème, le thérapeute propose : 

  • "Gardons vos ruminations, elles sont importantes, mais limitons-les à 30 minutes par jour, à heure fixe. Votre problème mérite ce temps dédié." 

Cette prescription utilise la résistance en l'intégrant plutôt qu'en s'y opposant.

Explorer les effets systémiques des thérapies précédentes

Le thérapeute oriente l'exploration vers les conséquences relationnelles et pragmatiques des thérapies antérieures.

L’intervenant peut demander :

  • "Qu'est-ce qui a changé dans votre vie quotidienne après avoir compris l'origine de votre problème dans vos thérapies précédentes ?" 

ou 

  • "Comment votre entourage a-t-il réagi quand vous avez commencé à appliquer les conseils de vos précédents thérapeutes ?"

Face à un patient qui précise avoir suivi plusieurs thérapies pour un problème d'anxiété sociale, le thérapeute peut lui demander : 

  • "Après avoir acquis toute cette compréhension sur les origines de votre anxiété dans vos thérapies précédentes, comment votre famille a-t-elle réagi à ces nouvelles connaissances ?" 
  • Le patient répond : "Ils étaient soulagés que je comprenne enfin pourquoi j'étais anxieux, mais paradoxalement, ils continuent à m'encourager à éviter les situations sociales." 
  • Le thérapeute poursuit : "Et quel effet cela a-t-il eu sur votre capacité à affronter ces situations ?" 
  • Le patient, après réflexion, lui dit : "Je me sens plus légitime à éviter ces situations. Maintenant que j'ai une explication validée par des professionnels, ma famille respecte davantage mon besoin d'éviter certaines situations."

Cette exploration révèle comment la compréhension acquise dans les thérapies précédentes a paradoxalement renforcé le système d'évitement en le légitimant, et cela ouvre ainsi une piste d'intervention stratégique.

Créer des expériences émotionnelles correctrices

La spécificité de l'approche systémique stratégique est de créer des circonstances où le patient peut vivre des expériences qui transforment ses perceptions rigides et ses réactions émotionnelles, libérant ainsi des possibilités d'action jusque-là bloquées, sans chercher à lui "faire comprendre" directement ce qui ne va pas.

En séance, adopter une communication suggestive et analogique

Le thérapeute utilise des métaphores qui ouvrent de nouvelles perspectives :

  • "Votre situation me fait penser à quelqu'un qui essaierait de sortir des sables mouvants en se débattant énergiquement... alors que parfois, rester immobile permet de flotter et de se dégager doucement."

Une communication indirecte permet de contourner les résistances rationnelles et d'atteindre un niveau plus profond de compréhension, où les perspectives rigides peuvent s'assouplir sans confrontation directe.

L’intervenant valorise également les efforts antérieurs tout en suggérant des alternatives :

  • "Votre détermination à résoudre ce problème montre votre force de caractère. Cette même force pourrait se manifester différemment, peut-être en acceptant temporairement que le problème soit là, tout en vivant pleinement d'autres aspects de votre vie."

Entre les séances, inciter son patient à mener des expériences réflexives ou comportementales

Le thérapeute propose des tâches d'observation qui modifient la perception sans changer directement le comportement. Pour une personne anxieuse qui a multiplié les thérapies, le thérapeute peut prescrire : 

  • "Chaque fois que vous ressentirez de l'anxiété cette semaine, au lieu d'essayer de la diminuer ou de vous raisonner, observez avec curiosité où exactement dans votre corps cette sensation se manifeste, comme si vous étiez un scientifique étudiant un phénomène intéressant."

L’intervenant conçoit des prescriptions paradoxales qui interrompent les tentatives de solution. 

Pour un patient qui a multiplié sans succès des techniques de relaxation pour gérer son stress, le thérapeute lui propose d'expérimenter : 

  • "Trois fois par jour, pendant 5 minutes, faites intentionnellement monter votre niveau de stress, puis notez précisément comment vous y parvenez."

Cette prescription a pour enjeu de transformer le symptôme d'involontaire à volontaire, et cela a pour effet de changer fondamentalement sa nature. Le patient va découvrir qu’il peut avoir un contrôle dessus.

Postures thérapeutiques pour créer du doute constructif - Adopter une position de "non-savoir" stratégique

Au lieu de se positionner comme un expert supplémentaire, le thérapeute peut exprimer une curiosité authentique.

  • "J'aimerais comprendre comment vous vivez cette situation au quotidien..."

Valoriser l'expertise du patient sur sa propre expérience tout en introduisant du doute sur ses conclusions

Face à un patient qui a accumulé diagnostics et théories sur son problème, le thérapeute répond : 

  • "Vous avez une compréhension remarquable de ces mécanismes. Je me demande si parfois cette compréhension elle-même ne devient pas un peu encombrante dans certaines situations concrètes de votre vie... Qu'en pensez-vous ?"

Une intervention équilibrée qui reconnaît l'investissement intellectuel du patient tout en semant délicatement le doute sur l'utilité pratique de ce savoir, crée un espace où une nouvelle perspective peut émerger sans confrontation directe.

Différencier l'approche orientée résolution de problème

Un constat fréquent en thérapie systémique et stratégique est que de nombreux patients ayant consulté différents thérapeutes n'ont jamais expérimenté une approche véritablement orientée résolution de problème. Cette distinction devient alors un levier thérapeutique puissant.

Questionner directement sur l'orientation des thérapies précédentes

Une question simple mais efficace à poser au patient multi-thérapies est : 

"Ce que vous avez fait jusqu'à présent dans vos thérapies, était-ce orienté résolution de problème ?"

Un thérapeute demande à un patient qui a suivi plusieurs thérapies analytiques et humanistes : 

  • "Dans ces approches précédentes, l'objectif était-il de comprendre les origines et les causes de votre problème ou plutôt de trouver des solutions concrètes et pratiques pour le résoudre dans votre quotidien ?" 

Le patient réalise alors que toutes ses démarches antérieures appartenaient à la première catégorie.

Cette question permet également de mettre en lumière deux cadres thérapeutiques fréquents mais limités dans leurs effets que les patients ont souvent expérimentés. 

Le cadre thérapeutique du « bien-être par la discussion »

De nombreux patients rapportent avoir été dans des thérapies où l'on s'intéressait à leur bien-être par la discussion, sans jamais considérer le mal-être et ses manifestations actuelles comme le fruit d'interactions spécifiques impliquant leur responsabilité. 

Une approche centrée uniquement sur l'écoute et l'empathie, bien que réconfortante dans l'immédiat, peut involontairement perpétuer le problème en n'offrant pas les outils concrets nécessaires pour transformer les schémas interactionnels problématiques.

Il est fréquent qu'un patient rapporte : "Mon précédent thérapeute m'écoutait avec empathie pendant que je parlais de mes problèmes. C'était apaisant sur le moment, mais quand je rentrais chez moi, je me retrouvais face aux mêmes situations sans savoir comment agir différemment."

 Le cadre thérapeutique par le « traitement médical »

D'autres patients ont principalement connu un modèle médical focalisé sur l'ajustement des médicaments et la multiplication des diagnostics. 

Une médicalisation intensive de la souffrance psychique peut graduellement transformer l'identité même du patient et le réduire à un ensemble de dysfonctionnements biologiques qu'il ne peut contrôler.

Un patient explique : "On m'a d'abord dit que j'avais une dépression, puis une bipolarité, puis un trouble borderline, avec des médicaments différents à chaque fois. J'ai fini par me dire que mon cerveau était défaillant et que seuls les médicaments pouvaient m'aider, même s'ils ne font que compenser et ne sont pas toujours fiables."

Ces expériences médicales ont souvent rigidifié la perception du patient en l'enfermant dans une vision exclusivement somatique de ses symptômes : 

  •  "Je suis malade", 
  • "Mon corps (particulièrement mon cerveau) est défaillant", 
  • "Seul un traitement médical peut compenser ce dysfonctionnement, mais sans jamais le résoudre".

Évaluer d'abord l'adhésion aux diagnostics

Avant de suggérer une autre perspective, le thérapeute systémique stratégique évalue l'attachement du patient à ses diagnostics, car son degré d'adhésion révèle souvent la rigidité des perceptions à considérer.

Une exploration initiale permet de cartographier le terrain des croyances du patient et de révéler les points d'ancrage comme les zones de flexibilité.

Elle offre ainsi au thérapeute des indications précieuses pour calibrer son intervention

Le thérapeute pose une question exploratoire : 

  • "Comment ces différents diagnostics ont-ils influencé votre façon de vous voir et de comprendre vos difficultés ?" 

ou 

  • "Dans quelle mesure vous reconnaissez-vous dans ce diagnostic de trouble borderline ?"

Cette exploration révèle parfois des nuances importantes : certains patients s'accrochent fermement aux diagnostics car ils donnent sens à leur souffrance bien qu’ils les condamnent dans une voie sans guérison certaine, d'autres expriment des doutes sur la pertinence de ces étiquettes, et certains ont une relation ambivalente, à la fois soulagés d'avoir une explication et frustrés par le caractère statique de ces diagnostics.

Ajuster l'intervention selon le niveau d'adhésion aux diagnostics

En fonction du niveau d'adhésion, le thérapeute peut alors introduire une perspective alternative avec plus ou moins de subtilité. 

Cette calibration fine de l'intervention permet de respecter les croyances du patient tout en introduisant délicatement de nouvelles perspectives. 

Cela crée un équilibre optimal entre le respect de son modèle explicatif et une ouverture au changement.

Pour un patient fortement attaché au modèle médical, le thérapeute peut lui dire : 

  • "Il est vrai que ces facteurs biologiques ont une influence possible et, je me demande si nous pourrions également explorer comment certaines façons d'interagir avec votre entourage pourraient amplifier ou atténuer ces difficultés. Seriez-vous curieux d'explorer cette dimension    complémentaire ?"

Pour un patient exprimant des doutes sur les diagnostics, le thérapeute posera la question suivante : 

  • "Si j'ai bien compris, on vous a proposé une explication médicale à votre souffrance. Je me demande si nous pourrions explorer une autre perspective : et si certaines de vos difficultés venaient non pas d'un dysfonctionnement interne, mais de façons spécifiques de réagir à certaines situations ? Cela nous ouvrirait des possibilités d'action concrètes, au-delà de simplement gérer les symptômes."

Présenter explicitement l'approche stratégique : une orientation résolument axée sur la résolution de problème

Après avoir identifié les schémas thérapeutiques infructueux, le thérapeute peut maintenant présenter son approche alternative.

  • "L'approche que je vous propose est spécifiquement orientée résolution de problème. Cela signifie que nous nous concentrerons moins sur 'pourquoi' vous avez ce problème et davantage sur 'comment' nous pouvons concrètement le résoudre."

La clarification initiale permet d'établir un contrat thérapeutique transparent où le patient comprend qu'il s'engage dans une démarche orientée vers l'action et le changement concret, distincte des approches compréhensives qu'il a déjà expérimentées.

Un patient peut dire : "J'ai déjà consulté trois thérapeutes qui m'ont aidé à comprendre mes angoisses, mais je me sens toujours aussi anxieux." 

Le thérapeute lui répond : "Si je comprends bien, ces approches vous ont apporté de la compréhension, ce qui est précieux. L'approche que je vous propose est différente car elle est spécifiquement orientée résolution de problème. Plutôt que d'explorer davantage les origines de votre anxiété, nous allons observer ce qui se passe concrètement quand elle apparaît et expérimenter des façons différentes d'y réagir. Cela vous intéresserait-il d'explorer cette voie ?"

Effets sur l'engagement thérapeutique du patient

Préciser clairement la spécificité de l’approche systémique et stratégique a souvent pour effet : 

  • d’attiser la curiosité du patient pour qui cette perspective est nouvelle, 
  • de réactiver l'espoir d'un changement possible 
  • et de faciliter l'engagement dans le processus thérapeutique.

Un patient chronique, désabusé après des années de thérapie, montre soudain un regain d'intérêt quand il comprend que l'approche proposée ne va pas chercher à ajouter une nouvelle couche d'explication à son problème, mais à travailler concrètement sur ce qu'il peut modifier dans sa vie quotidienne.

Créer un contraste sans dévaloriser les approches précédentes

Il est important de présenter cette différence sans dévaloriser les démarches déjà effectuées.

Une posture d'inclusion thérapeutique permet au patient de préserver la valeur de son parcours passé tout en s'ouvrant à une nouvelle perspective.

Cela crée ainsi un pont entre son passé thérapeutique et les possibilités futures.

Le thérapeute précise :

"Ces approches précédentes ont leur valeur et vous ont certainement apporté des éclairages. Nous allons maintenant les compléter en explorant une autre dimension."

Il peut aussi reformuler : 

"Comprendre pourquoi on a un problème et savoir comment le résoudre sont deux démarches différentes mais complémentaires. Maintenant que vous avez exploré la première dimension, nous pourrions nous concentrer sur la seconde, seriez-vous prêt à l'expérimenter ?"

Utiliser l'humour et le paradoxe pour assouplir les perceptions rigides

Le thérapeute introduit des éléments ludiques qui créent de la distance avec le problème. 

L'humour et le paradoxe agissent comme des clés qui déverrouillent les certitudes trop bien ancrées.

Ils ouvrent au patient la voie pour explorer avec légèreté ce qu'il percevait auparavant comme menaçant ou immuable.

Pour un patient perfectionniste qui a multiplié les thérapies sans succès, le thérapeute propose : "Et si nous tentions une expérience cette semaine ? Essayez de faire délibérément quelque chose d'imparfait chaque jour -- une petite imperfection intentionnelle, comme un acte de rébellion joyeuse contre cette exigence qui vous épuise."

Pertinence de l’approche systémique stratégique dans le contexte des multi-thérapies

L'approche systémique stratégique offre une alternative précieuse pour les patients ayant déjà expérimenté diverses thérapies sans résultats satisfaisants. Sa force réside dans sa capacité à contourner les résistances et à proposer des interventions pragmatiques qui s'affranchissent du besoin préalable de compréhension exhaustive pour privilégier le changement concret. Plusieurs aspects significatifs la distinguent et en font une ressource particulièrement adaptée aux contextes où d'autres approches ont montré leurs limites.

Rupture du cycle des tentatives de solution sans confrontation

L'intervenant ne cherche pas à faire comprendre au patient que ses tentatives de solution sont inefficaces, mais crée plutôt des expériences qui parlent d'elles-mêmes. Il évite ainsi d'ajouter une couche supplémentaire de culpabilité.

L'art de l'intervention stratégique réside dans sa capacité à transformer subtilement ce que le patient considère comme une solution en partie du problème, sans jamais remettre en question sa logique personnelle.

Une patiente qui a consulté de nombreux thérapeutes pour ses attaques de panique se voit proposer de tenir un carnet de bord détaillé pour "observer plus finement les variations d'intensité et de fréquence afin de mieux comprendre le phénomène". Cette prescription d'observation, apparemment simple, rompt sa tentative de solution habituelle qui consistait à éviter de porter attention au symptôme par peur de le déclencher. En devenant observatrice de ses propres réactions, elle abandonne paradoxalement la lutte contre l'anxiété sans que ses démarches thérapeutiques passées soient remises en question.

Élargissement des perceptions par l'expérience plutôt que par l'explication

L'approche stratégique favorise des expériences vécues qui modifient naturellement les perceptions rigides, sans passer par une compréhension intellectuelle.

Dans une situation thérapeutique impliquant un patient souffrant de TOC avec des vérifications compulsives, le thérapeute choisit de se concentrer sur un symptôme spécifique (les comportements de vérification) plutôt que d'aborder exclusivement le problème du point de vue de son historique ou de remettre en question sa cohérence. Il prescrit une saturation des vérifications à des moments précis de la journée. Il crée ainsi une expérience concrète qui modifie la relation du patient avec son symptôme, sans avoir besoin d'explorer au préalable les origines ou le sens profond de sa problématique.

Utilisation de la résistance comme ressource

La résistance du patient n'est pas combattue mais intégrée dans l'intervention, ce qui diminue paradoxalement son intensité.

À un patient qui reste attaché à son analyse intellectuelle de ses problèmes après plusieurs thérapies, l'intervenant va l'encourager à poursuivre activement cette modalité : 

"Continuez cette analyse, mais limitez-la à 30 minutes par jour, en l'écrivant plutôt qu'en y pensant continuellement." 

Cette prescription respecte son besoin d'analyse tout en le limitant et en y apportant une modalité d'exécution différente.

Dissolution de la logique circulaire par des expériences concrètes

Au lieu d'expliquer la circularité problématique, l'approche stratégique la brise par des expériences qui démontrent concrètement d'autres possibilités.

La puissance de cette approche réside dans sa capacité à déplacer le regard du patient de l'intérieur vers l'extérieur. 

Elle révèle ainsi les interactions systémiques qui maintiennent le problème en place.

Lors d'une supervision clinique, un thérapeute évoque le cas d'une patiente qui "consomme de la relation thérapeutique" après de multiples suivis sans changement. Son superviseur lui suggère de créer un doute en questionnant "qui, dans son entourage, perdrait le plus si elle changeait vraiment ?". Il introduit ainsi une perspective systémique que la patiente n'avait jamais envisagée. Cette question stratégique permet d'explorer si le maintien du problème sert une fonction dans son système relationnel plus large.

Utilisation du doute comme ressource transformative

Le doute n'est pas seulement accepté mais subtilement cultivé à travers des questions et des expériences qui élargissent le champ des possibles.

Dans la démarche systémique et stratégique, le doute devient un allié précieux qui fissure les certitudes rigides et ouvre la porte à de nouvelles perceptions et à de nouvelles possibilités d’action.

Il instaure ainsi un espace où le changement peut s'infiltrer naturellement.

Face à un patient convaincu après de multiples thérapies que son anxiété est une caractéristique immuable de sa personnalité, le thérapeute propose : "Par simple curiosité, observez cette semaine s'il existe des moments, même très courts, où cette anxiété fluctue légèrement en intensité. Notez simplement ces moments sans chercher à les expliquer, nous en discuterons lors de notre prochaine séance."

Pour conclure

Les patients ayant multiplié les thérapies sans résultat présentent des défis spécifiques qui nécessitent une approche distincte. Leur parcours thérapeutique antérieur, souvent riche en explications mais pauvre en changements concrets, a généralement renforcé leur système de perception rigide et leurs tentatives de solution inefficaces.

L'approche systémique stratégique avec ces patients ne consiste pas à ajouter une nouvelle couche d'interprétation à leur histoire déjà suranalysée, ni à critiquer leurs démarches précédentes.

L'innovation majeure de l’intervention systémique stratégique réside dans son changement radical de perspective : 

plutôt que de chercher à comprendre pourquoi le problème existe, elle se concentre sur ce qui le maintient dans le présent.

Sa particularité réside dans sa capacité à différencier clairement l'orientation résolution de problème des autres approches, à questionner stratégiquement le "pourquoi maintenant" de la consultation, et à créer des expériences concrètes qui court-circuitent les tentatives de solution rendant leur problème persistant et l'aggravant.

En reconnaissant que ces patients sont des experts de leur problématique mais prisonniers du système rigide formé par leurs perceptions et leurs tentatives de solution , elle utilise une communication suggestive et des tâches spécifiques pour assouplir la rigidité sans confrontation directe.

C'est précisément avec ces patients multi-thérapies que l'approche stratégique peut démontrer sa valeur distinctive : 

Là où d'autres approches ont pu renforcer involontairement le système problématique, l’approche systémique propose non pas une nouvelle théorie explicative, mais une expérience transformative ouvrant vers des possibilités que le patient n'avait pas encore envisagées dans son long parcours thérapeutique.

© LACT, l’action pour la transformation - Avril 2025

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